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Bel homme de cinquante-neuf ans aux cheveux gris,
 Bonanno ne répondit pas. Ce soir-là il était sorti sans
 garde du corps ni arme. Même s'il y avait eu foule
 sur l'avenue, il n'aurait pas appelé à l'aide, parce qu'il
 considérait déjà son enlèvement comme une affaire
 privée. Il s'efforça de recouvrer son calme pour mieux
 saisir la situation. Les deux truands continuaient
 à l'entraîner le long du trottoir en lui paralysant les bras.
 La pluie froide et le vent filtrant à travers son complet
 de soie gris le firent frissonner. Dans la brume de Park
 Avenue il ne vit rien que les feux rouges arrière de son
 taxi qui s'éloignait et n'entendit que la lourde respiration
 des deux forbans. Tout à coup un bruit de pas rapides
 retentit sur le trottoir derrière lui et Maloney cria :
 "Hé, que diable ! qu'est-ce qui se passe ?"
Un mardi d'octobre 1964, un homme est enlevé. Il s'agit
 de Joseph Bonanno, alias "Joe Bananas", parrain d'une
 famille de la mafia new-yorkaise. Ainsi commence
 l'enquête de Gay Talese. Ainsi commence la "guerre
 des Bananes", conflit opposant les principales familles
 du crime organisé. Fascinante plongée dans l'univers de
 la Cosa Nostra, ce chef-d'oeuvre du journalisme n'est ni
 un roman ni un livre d'histoire. Dans Ton père honoreras,
 rien n'est imaginaire, tout est vrai. Mais la vérité de la
 mafia est plus extraordinaire que la fiction. Et aussi
 plus émouvante.
Considéré par Tom Wolfe comme le père du "Nouveau
 Journalisme" - ce type de reportage croisant les
 exigences du journalisme aux techniques de la fiction -,
 Gay Talese, maître dans l'art d'évoquer "le courant fictif
 qui coule sous le flux de la réalité", capte dans l'ombre
 d'une histoire l'esprit d'une époque.