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L'application de modèles mathématiques à l'analyse de l'action rationnelle
a sans conteste révélé sa fécondité. Ceux-ci sont particulièrement requis
lorsqu'il s'agit de penser l'action en situation d'incertitude. Cependant, d'un
point de vue théorique et épistémologique, la mise en oeuvre effective de ces
modèles soulève de réelles difficultés, qui invitent non pas à y renoncer, mais à en
préciser les concepts, à en interroger les principes et les modalités d'application.
La théorie des probabilités s'offre naturellement comme instrument privilégié
pour rendre compte de l'action en situation d'incertitude. Pourtant, on sait
que les comportements empiriquement observés peuvent déroger aux
principes du calcul, et il est possible d'envisager d'autres modèles que les
probabilités subjectives pour décrire nos décisions face à l'incertain. Par
ailleurs, l'analyse des croyances véhiculées par les agents constitue l'une des
sources principales de difficultés, par la complexité de leurs processus de
révision, et par le caractère problématique de la relation qui les lie aux
préférences individuelles. Et la représentation de cette relation n'est pas
indépendante de la conception de la rationalité mobilisée. Celle-ci ne se
réduit pas nécessairement à sa version instrumentale, mais peut intégrer aussi
bien des impératifs éthico-politiques que l'attitude psychologique manifestée
par l'agent face au risque. Enfin, si les probabilités sont affaire de degrés, ce
n'est le cas ni de la décision, ni de l'application de la théorie, et la question se
pose alors de l'adéquation du résultat mathématique à l'objet qu'il informe.
Ce sont ces difficultés que cet ouvrage entend affronter et éclairer.