En savoir plus
« Le grand malheur, pour un auteur, est qu'il soit un homme public ; qu'il le devienne nécessairement, dès qu'il se mêle de publier. Il a beau faire tout ce qu'il peut pour départager sa personne en deux moitiés dont l'une est l'homme, qu'il se réserve, l'autre l'auteur qu'il abandonne aux éléments et aux événements conjugués ; la cloison qu'il voudrait étanche ne l'est guère et a tôt fait d'être percée à jour. [...] Ce qui m'encourage quand même à sortir ici de mon rôle d'auteur et à laisser parler l'homme pour une fois, c'est que, levant la tête de dessus mon papier, ce sont des hommes pareils à moi que je vois passer par la fenêtre et qu'en même temps que de moi, c'est de ces hommes qu'il s'agira » (« Seconde lettre »).
Après avoir abandonné le genre réflexif au profit du roman au lendemain de la Première Guerre mondiale, Ramuz renoue avec l'essai dans la seconde moitié des années 1920, alors qu'il bénéficie enfin d'une situation éditoriale stable, et même enviable, tant en France qu'en Suisse romande. Ces velléités essayistiques se manifestent dès 1925, mais resteront infructueuses jusqu'à la publication des Six cahiers, entre 1928 et 1929. Adepte de « l'attitude interrogative », mais aussi de l'aphorisme assertif, Ramuz s'emploie surtout, dans un premier temps, à défendre son style, alors en butte à de vives critiques, tout en questionnant plus fondamentalement la fonction du poète dans la société. Puis, au début des années 1930, à l'instar de Paul Valéry, il décide lui aussi de porter son regard sur le « monde actuel », celui de l'entre-deux-guerres. Assistant, impuissant, à la politisation, du champ littéraire, il persévère dans son choix de se présenter comme étant au-dessus des querelles de partis, et engage rapidement sa réflexion sur le « plan métaphysique ».
Ce volume contient un essai inédit de 1927 (« Ressources de la France »), les essais parus dans Six cahiers (« Remarques », « Lettre à un éditeur », « Seconde lettre », « Pour prendre congé »), la « Lettre à Bernard Grasset », qui introduit en 1929 la réédition du recueil Salutation paysanne, ainsi que les essais Taille de l'homme (1933) et Questions (1935).
