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«On ne cesse d'oublier d'aller jusqu'au fondement. On ne
pose pas assez profond les points d'interrogation», écrivait
Wittgenstein. L'oeuvre de Francis Jacques est une franche réplique
à cette «remarque». Aussi occupe-t-elle une place originale
dans la philosophie de notre temps.
L'entreprise était audacieuse ; et elle devait être innovante.
Les obstacles philosophiques étaient nombreux ; il fallait les
reconnaître et les interroger jusqu'à leurs plus profondes racines.
La démarche analytique, en l'occurrence, a fait merveille. Elle ne
fut qu'un point de départ. Mais il était décisif parce qu'il
conduisait à bouleverser l'échiquier sur lequel la tradition des
siècles avait construit ses systèmes philosophiques.
Sur le chemin ainsi frayé, l'espace logique de l'interlocution a
supplanté le subjectivisme-roi des philosophies de la conscience.
L'exploration du dialogisme communicationnel a été la voie d'un
questionnement approfondi qui, d'un point de vue métaphysique,
a découvert la relation comme source originaire et fondationnelle
de la pensée. À cette source pure puise l'exigence transcendantale
qui, alliée aux structures formelles du travail de la pensée,
commande l'érection du sens. En faisant du questionnement
patiemment poursuivi l'activité génétique et critique de la pensée,
l'interrogation radicale est devenue, en raison de sa portée
ontologique, une élévation spirituelle. Aussi la sagesse peut-elle
désormais défier les pathologies qui gangrènent les manifestations
de l'existence. L'horizon s'éclaire de la lumière divine : il est
un lieu de confiance et d'espérance.
Au processus de «dé-construction» généralisée que
développent aujourd'hui tant d'ouvrages, l'oeuvre de Francis
Jacques oppose le mouvement d'une reconstruction spirituelle
que commande, outre l'alliance hardie de la logique et de la
métaphysique, l'écoute de la théologie. En fouillant les puissances
originaires de l'interrogativité dont l'intégralité et la radicalité font
la noblesse de la pensée, elle trace l'itinéraire au long duquel elle
propose, contre la désespérance d'un temps de crise, de
philosopher autrement pour retrouver les repères effacés et
reconquérir, sur le chemin de l'Absolu, l'humanité perdue de
l'homme. C'est un recommencement.