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L'Akhlâq al-wazîrayn (Livre des moeurs des deux vizirs ou Satire
des deux vizirs) est l'un des portraits-charges les plus virulents et
les plus savoureux de la littérature arabe classique. Il s'agit d'une
oeuvre extrêmement personnelle, rédigée dans une langue étincelante
de précision et de cruauté, dans laquelle un intellectuel appelé
à la cour de princes avides de reconnaissance s'estime sous-utilisé
au regard de ses compétences, humilié et mal payé. Tawhîdî
règle ses comptes au premier chef avec un potentat incapable de
reconnaître son talent, le flamboyant et craint vizir bouyide al-Sâhib
Ibn `Abbâd, en second lieu avec son avare et cruel prédécesseur à la
charge du vizirat, Ibn al-`Amîd.
Pourtant, cet ouvrage ne se conçoit pas comme une vengeance
personnelle, et son auteur assure que si la colère en est la cause
première, son but est de faire oeuvre utile auprès des savants dans
leurs difficiles relations aux puissants. Ces deux vizirs, issus du corps
des secrétaires, ont pour Tawhîdî franchi une limite, celle qui
sépare les intellectuels des hommes de pouvoir. Or, le prince doit-il
être un intellectuel ? Celui qui a pouvoir d'offrir ou de refuser, de
faire vivre ou mourir, peut-il en même temps revendiquer sa place
parmi les écrivains ?