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Qu'est-ce que l'homme ? Depuis près de deux mille ans, la question appelle
 un commentaire de l'épisode biblique qui met aux prises un homme, une
 femme, un serpent et un fruit défendu. Loin de se résumer à un péché originel
 auquel on ne croit plus, l'histoire d'Adam et Ève témoigne, selon
 Paul Ricoeur, du «fond inexprimé - et inexprimable en langage direct et
 clair - de l'expérience humaine». Cette histoire est partagée par les trois
 monothéismes, mais le christianisme en a fait le récit fondateur de son
 anthropologie générale, propageant ainsi une vision bien particulière, occidentale,
 de l'être humain.
Il est fascinant de suivre, avec François Flahault, l'élaboration qu'a connue
 le récit de la Genèse, qui prend vraisemblablement ses racines dans la
 Préhistoire : comment le récit a été christianisé ; quelle a été l'influence
 du platonisme, et en particulier celle de l'étonnante histoire des androgynes
 coupés en deux racontée dans le Banquet. L'auteur nous montre
 comment le récit de la Genèse, lorsqu'il circulait encore dans un monde
 «païen», invitait à assumer le caractère problématique et
 douloureux de la condition humaine, alors que sa lecture
 chrétienne en fait le premier acte d'une histoire universelle
 centrée sur le Salut, c'est-à-dire sur le désir de dépasser la
 condition humaine. L'ouvrage démêle ce qui s'y noue entre
 mythe, religion et philosophie, et pointe ce que l'on pourrait
 appeler l'«erreur de Platon».
L'histoire d'Adam et Ève a donné lieu à une controverse sans fin sur les
 effets du péché originel, optimisme humaniste contre pessimisme augustinien,
 qui a structuré l'espace de la pensée occidentale. Pour sortir du cercle
 qui fait obstacle au renouvellement de la pensée, il est indispensable de
 revenir aux sources de cette histoire antédiluvienne.