Mehr lesen
Dès sa publication, ce premier roman de Markus Werner a propulsé son
auteur au rang des romanciers de langue allemande les plus remarqués
aujourd'hui. Le succès de ce livre culte, d'une rare radicalité, ne s'est jamais
démenti, alors même que cinq romans, tous traduits en français, sont venus
confirmer la maîtrise de l'écrivain. Dans leur singularité, tous les héros de
Werner ont quelques points communs : confrontés à un moment où leur vie
semble basculer, ils font preuve d'un nombrilisme à la fois désopilant et
désespéré, et rêvent de partir. Zündel s'en va, avec son héros pitoyable, désenchanté,
titubant et chaplinesque, propose la meilleure entrée dans l'univers
tragi-comique de Markus Werner.
Konrad et Serafino passèrent la
soirée de concert. Ils burent
beaucoup, énormément, Zündel
même beaucoup trop mais ce qui
naquit entre eux était plus qu'une
fraternité banale. Une grande affection
les unissait, un sentiment de
parenté, une complicité, et tous
deux avaient l'impression de se
connaître depuis toujours. Et pourtant
ils n'échangèrent pas beaucoup
de paroles, la musique des
juke-box des différents lieux qu'ils
fréquentèrent était trop envahissante.
À un certain moment,
Zündel demanda : Tu crois qu'ici,
on peut se procurer un revolver, je
veux dire sans permis ? Alors
Serafino l'entraîna dehors dans la
ruelle, et lui dit : Bien sûr, pas de
problème ! Mais ce serait dommage.
- Quoi donc ? demanda Zündel.
- Si tu te supprimais ! Tu verras,
même sans raccourcis la vie est
assez courte comme ça. Tu es malheureux
? - Presque toujours, dit
Zündel. Serafino lui serra la main
en disant : Fratello mio.