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Tim Burton est toujours resté le même. Corps, apparence, univers, le cinéaste, depuis l'adolescence jusqu'à aujourd'hui, âgé de cinquante ans, porte sur sa pâle figure et sa décoiffante chevelure sa singularité même. C'est sa personnalité, sa sincérité, sa façon de jouer cartes sur table. Tim Burton a su faire coïncider son univers personnel avec quelques-unes des figures
majeures du cinéma américain récent, créateur de la série des Batman, inventeur d'Edward aux mains d'argent, de Beetlejuice, de l'Etrange Noël de Mister Jack, réalisateur d'Ed Wood, Mars Attacks, Sleepy Hollow, Big Fish, ou des prochains Charlie et la chocolaterie et Corpse Bride. L'excentricité du talent n'est pas incompatible avec les responsabilités quasi industrielles des
budgets hollywoodiens d'aujourd'hui. C'est ce paradoxe qui fonde le cinéma de Tim Burton. Car voici un cinéaste chez qui les émotions sont le moteur de la création: un projet, même passé par des dizaines de scénaristes de studio, ne peut l'intéresser que s'il offre des liens émotionnels forts avec sa propre personnalité, avec son univers, sa vie ou sa psyché intime. Les succès de Tim
Burton n'ont pas compromis la personnalité du cinéaste, confirmant au contraire sa stratégie de contrebandier: il demeure l'un des rares cinéastes hollywoodiens à pouvoir concilier tous les publics, des adolescents à la critique, des movies fans aux artistes les plus conceptuels. Qui pouvait prédire que le jeune dessinateur de chez Walt Disney, s'acharnant à animer les
séquences les plus «mignonnes» de Rox et Rouky, allait devenir l'une des révélations majeures du cinéma contemporain? Mais dès ses débuts, comme s'il pervertissait le système qui l'élevait, Burton a mis sa puissance visionnaire au service d'un univers excentrique, poétique, carnavalesque, caustique, qui visait à détourner, tordre, défaire les traces du monde «féerique»: il filme l'envers, morbide, fantastique et néanmoins magique de la normalité américaine. Burton a forgé un univers qui évite le cinéma classique, même s'il est nourri des genres de l'horrifique et des séries B de l'effroyable. Un univers qui s'invente, littéralement, grâce à ses visions graphiques, ses décors gothiques, ses masques de terreur, ses grimages sensuels, ses pulsions morbides, sa forme narrative proche des récitatifs de l'opéra, son art des portraits croisés, autant d'éléments qui ont fait imploser chez lui le concept de mise en scène. Si bien que Tim Burton est davantage qu'un cinéaste ou un metteur en scène: il est un créateur visionnaire dont l'univers se passe des règles et des formats établis. Une sorte de voyant au pays du film industriel, un artiste qui regarde peut-être davantage vers la poésie que vers le cinéma. L'album est illustré de nombreuses photos couleur de tous les films, de photos de tournage, de documents et des dessins que fait Tim Burton pour
préparer ses films. ...