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Même si leurs mobiles sont, en gros, identiques,
la chouannerie qui a eu pour théâtre le nord de la Loire
(Bretagne, Maine, Normandie) ne saurait être confondue avec
la Vendée. Sur la rive gauche de la Loire, le soulèvement a été
instantané, massif et unifié, mais la Vendée militaire agonisera
en 1794 sous les coups de la Terreur. Sur la rive droite de la
Loire, les provinces chouannées ne l'ont été ni entièrement, ni
simultanément, et c'est après la Terreur que leur rébellion
connut ses temps les plus forts. Pourtant, la naissance de la
chouannerie est antérieure au soulèvement vendéen et elle a
duré douze ans, bien plus longtemps donc que la guerre de
Vendée. Mais ce fut une «guérilla du clair de lune», une
mosaïque d'insurrections successives, de coups de main sans
coordination, sans grand rassemblement (excepté Quiberon en
1795). C'est pourquoi, s'il y a des ouvrages sur telle ou telle
chouannerie (mainiote, normande, bretonne) et sur telle ou
telle de leurs grandes figures (Jean Chouan, La Rouërie,
Talmont, Cadoudal, Frotté), il n'y a guère d'histoire générale
englobant en un seul volume toutes ces chouanneries qui
empoisonnèrent la Convention, le Directoire et le Consulat.
D'où l'importance, la difficulté et l'originalité de l'entreprise
d'Anne Bernet. Elle nous en donne un récit haut en couleur, à
la fois tragique, romanesque et cocasse ; Mainiote elle-même,
elle ressuscite dans sa diversité un peuple de paysans, de faux-saulniers,
de marins-pêcheurs, d'artisans et de nobles dont le
combat religieux et politique constitue de 1792 (conjuration
de La Rouërie) à 1804 (décapitation de Cadoudal) le plus long
et le plus captivant chapitre de la contre-Révolution.