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Je ne me suis rendu compte de son existence que lorsque
je l'ai vu, un midi, au milieu du carrefour près de l'usine, alors
que je m'apprêtais à aller bosser.
Il était au centre du trafic, frôlé de près par des camions plus
ou moins gros, plus ou moins rapides, en train de s'escrimer
à soulever une plaque de tôle et à la replacer dans un Caddie.
(...) Je ne sais pas pourquoi je ne l'avais jamais vu auparavant.
Peut-être a-t-il toujours fait partie des fantômes que nous
croisons sans les voir lorsque nous quittons rapidement l'usine
et traversons ce qui s'appelle le Vieux Bourg, quartier situé en
lisière de nos barbelés.
Depuis, c'est comme si je ne voyais plus que lui. Sans doute
parce que sa pauvreté et les galères qu'il doit supporter,
accentuent ma culpabilité de ne rien faire pour lui. Mais aussi
parce que sa présence me montre du doigt ce Vieux Bourg
qui jouxte l'usine et que je ne voyais plus. Je n'y prêtais plus
attention, parce qu'il faisait partie du quotidien et de l'usine
même.
Pourtant, le Vieux Bourg est là, et encore là.
«Jeannot, Carole, Abdelkrim : ils sont tous là, présents à quelques pas de
l'usine, cette machine à broyer les hommes et la vie dont Jean-Pierre Levaray
a déjà narré le quotidien avec brio dans Putain d'usine... Des hommes et
femmes ordinaires dont l'auteur nous conte quelques tranches de vie. Pas
toujours roses, souvent embuées de fraternité et de solidarité. Le juste portrait
d'une France d'en bas qu'ignorent à longueur d'années magazines et
journaux télévisés.»
Yonnel Liegeois (La Nouvelle Vie Ouvrière)