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«Quelqu'un a dit, en polonais sans doute, ne pas pouvoir supporter Dostoïevski
à cause de son "hystérie slave". Je partage cette réserve, en particulier quand
j'ai à extraire de bûchers ardents les braises de sa pensée, quand j'ai à couvrir
l'âme blessée de l'écrivain de mon frac élimé de penseur. Des frissons me parcourent
l'échine. Mieux vaudrait prendre ses jambes à son cou, filer à lasnaïa
Poliana, la "Claire Clairière", et laisser les délices de la fréquentation de Dostoïevski
à des adolescents exaltés et de froids explorateurs de "l'âme russe".
Impossible, pourtant... Hors de Dostoïevski, point de salut. (...)
Raskol, scission, division, cassure, ou pour dire la chose historique, "Schisme".
Mais aussi fracas de la hache qui fend la bûche. Crâne fendu à la hache de la
vieille usurière. Icône brisée en deux planchettes. Raskolnikov... Pseudonyme
qui va à la plupart des héros et des héroïnes de Dostoïevski, et rend compte
d'une perte fondamentale de l'aptitude à saisir que la hache est plus faite pour
fendre le bois que le crâne des petites vieilles. (...)
Fiodor Mikhaïlovitch... Raskolnikov nous attire dans l'abîme que la langue russe
appelle aussi biezdna. Un "puits", voilà qui sonne comme un euphémisme. Acceptant
d'être précipités dans le monde du Raskol, nous risquons de nous enfoncer
dans un sans-fond. Bezdna bezdnu prizyvaet, dit la Bible russe pour rendre le
latin abyssus abyssum invocat. Dostoïevski nous ouvre la Russie. Ouvre ? ! Il fracasse
à la hache, à grand ahan, le couvercle séculaire du sans-fond.»
Cezary Wodzinski, extrait de l'introduction.