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En 1847 Hermann Helmholtz publie son mémoire intitulé Sur la conservation de la force (Über die Erhaltung der Kraft). Jeune physiologiste encore méconnu, il y fait émerger le principe de conservation de l'énergie en lui offrant, dans une nouvelle perspective théorique, un cadre unificateur sans précédent: tout phénomène de la nature peut être interprété en termes de deux formes fondamentales de force, la force vive et la force de tension, ébauches de l'énergie cinétique et de l'énergie potentielle.
Pourtant, comme le montrent ici les auteurs, la force au sens d'Helmholtz n'est pas encore l'énergie. Sa physique de la force est l'expression d'une tension entre tradition et innovation: se basant sur une épistémologie d'inspiration kantienne, Helmholtz réussit la jonction entre les deux voies - newtonienne et leibnizienne - de la dynamique. L'analyse de sa pratique scientifique (conceptualisation, mathématisation, expérimentation), celle des conceptions du monde et de la science qui la sous-tendent, comme celle de la réception de son mémoire et de l'évolution ultérieure de ses idées sur la force permettent désormais de retoucher l'image mythique d'Helmholtz savant, créateur de la physique de l'énergie. Ces analyses aident aussi à comprendre d'où viennent les difficultés dès que l'on tente d'exposer aujourd'hui le concept d'énergie.
Dans cette visite guidée où l'on voit la science se faire, on découvre également comment les débats et les controverses que provoquent ses travaux novateurs peuvent en retour faire évoluer les idées, la pratique et les principes mêmes d'un chercheur. En percevant le décalage qui peut se produire entre la science telle qu'elle est enseignée et celle qui se pratique dans les laboratoires, on peut alors prendre du recul par rapport à certaines conceptions plus ou moins mythiques de la science et de l'activité scientifique.
