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Aux XIVe et XVe siècles, l'autobiographie en langue vernaculaire
trouve en l'allégorie narrative un mode d'exposition privilégié. Le je,
songeur et narrateur, y occupe une place centrale, foyer d'une rétrospection
proprement subjective et réflexive. Cette alliance passagère
de l'écriture de soi et de l'allégorie suscite des tensions que cristallisent
les deux Pèlerinage de vie humaine de Guillaume de Deguileville
(1330 et 1355) : l'indécision permanente qui entoure le statut du
sujet rhétorique dans la seconde rédaction, entre figure individuelle
et générique, brouille la visée du texte et les catégories formelles de
l'allégorie.
En s'emparant du modèle narratif et éthique du pèlerinage de vie
humaine, des auteurs laïcs (Thomas de Saluces, Philippe de
Mézières, Jean de Courcy, Olivier de la Marche, Octovien de Saint-Gelais),
expérimentent à leur tour les rapports ambigus et paradoxaux
que le je-écrivant entretient avec la figure du pèlerin.
L'autobiographie allégorique n'aura finalement trouvé son équilibre
qu'avec Christine de Pizan, dans ce dispositif dialogique hérité de
Boèce où l'expérience personnelle s'articule à une Philosophie générale
de l'Homme.
Il ne s'agit pas ici de reproduire le scénario d'une «émergence du
sujet médiéval» entre 1300 et 1500 : ce serait sous-estimer tout à la
fois les persistances de la topique et la force d'attraction et de déportement
à laquelle le récit expose le je-narrateur. Dans ces romans
allégoriques que sont le Chevalier errant de Thomas de Saluces et le
Séjour d'Honneur d'Octovien de Saint-Gelais, la première personne
s'aventure aussi, sous le manteau du pèlerin de vie humaine, sur les
voies de la fiction.