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Chez un auteur emblématique des questionnements qui ont traversé ces dernières décennies, ce livre tente de cerner les modalités d'une fascination ambiguë pour la voix. La voix, c'est l'Autre du texte, un reste qui échappe toujours aux frontières de la clôture et de la spécularité formalistes - et il n'est pas surprenant qu'elle permette de renouer avec certaines questions refoulées (le Sujet, la Présence, le Référent), tout en les déplaçant.
Elle se donne souvent comme médium privilégié d'une transparence communicationnelle propre à venir à bout des diverses frontières interpersonnelles et référentielles qui exilent chaque sujet loin d'autrui et loin du monde. Mais comment le texte écrit pourrait-il, lui, inclure en son sein cette voix qui lui est irrémissiblement étrangère, et qui se pose pourtant face à lui comme modèle euphorique de présence immédiate ? La question relève d'une étude énonciative et stylistique, qui rend compte des diverses stratégies de mimésis de voix vive à l'oeuvre dans les discours rapportés. Mimésis toujours ambiguë : l'analyse lexicale met au jour une configuration opposée, celle d'une voix « décharnée », fantôme qui a perdu ses frontières subjectives et temporelles. L'organe même de la parole, la bouche, décrite obsessionnellement, trahit la même tension entre fantasme de transparence et évidement subjectif.
Mais c'est peut-être la spécificité même de la voix écrite de Claude Simon qui se joue dans ce double mouvement. Prenant pleinement acte de l'absence constitutive de la voix, mais ne cessant de la désirer, ses livres savent simultanément rêver à la Présence et en faire le deuil...
