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Le public ne connaît plus guère aujourd'hui cette
princesse, qui fascina ses contemporains par son
intelligence, sa redoutable causticité, et surtout sa
tranquille audace de préférer sa propre cour à celle du
Roi-Soleil, qui la suivit dans la tombe.
Deux fois victime de la raison d'État, qui l'empêcha de
régner sur l'Angleterre, elle se replia sur les ressources
de sa culture et de son esprit, et grâce à son immense
fortune, fit sa joie de contempler et juger la comédie
humaine, au centre de laquelle sa haute naissance
l'avait placée. Fondatrice de la presse privée, friande
d'anecdotes et des dessous de la politique que lui
fournissait un étonnant réseau d'informateurs, elle eût
pu écrire sans relâche, sans cesser de nous intéresser.
Mais dans un souci de qualité, elle préfère, cinquante
ans après les événements, quand les passions et les
acteurs se sont tus, se limiter à cette phase convulsive
de son temps, la Fronde, où la monarchie faillit périr.
Mieux sans doute que les grandes mondaines, que nous
impose la littérature officielle, madame de Nemours
(à ne pas confondre avec sa belle-mère, la tapageuse
duchesse de Longueville, héroïne de la Fronde) nous
offre le régal d'un langage féminin parvenu à son état
de perfection.