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On ne raconte pas d'histoire, on ne représente pas de scène
sans rencontre : nul doute que la rencontre constitue l'une des
matrices les plus riches de la topique romanesque. Mais que
doit-on précisément entendre par «rencontre» ?
L'étude du Roman comique de Scarron, qui en décline toutes
les variations de l'amour le plus pur au burlesque le plus
cocasse, permet de s'interroger sur une notion beaucoup plus
complexe qu'elle n'en a l'air. À côté des classiques scènes de
rencontre amoureuse, de première rencontre, on voit alors surgir
des rencontres d'animaux et d'objets, mais aussi des rencontres
de mots et, au-delà, de cultures. Il ne s'agit ici ni de jouer sur le
mot, ni simplement d'établir une classification, mais de réfléchir
à l'interaction de ces niveaux de la rencontre, qui constitue un
dispositif fictionnel d'une redoutable efficacité.
Le Roman comique se trouve ainsi éclairé d'un jour nouveau,
où la physique d'Aristote et de Descartes, la circulation du théâtre
au roman, l'agencement de la matière espagnole, le traitement
distancié de l'héritage pétrarquiste et baroque, le passage à
l'image par l'illustration, prennent sens non seulement comme
moment de l'histoire littéraire française, mais comme creuset
théorique de la fiction.