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Dans les années 1945-1980, le cinéma a acquis une place privilégiée dans la
culture occidentale. Il s'est donné des objectifs aussi ambitieux que ceux que
s'assignaient au cours du siècle précédent les arts plastiques, la musique et la
littérature. Même si les studios américains ont incontestablement le rayonnement
le plus large, c'est en Europe que la cinéphilie est alors la plus exigeante, et que
sont conçus les projets les plus audacieux. Des «auteurs» y apparaissent, qui
parviennent, de film en film, à formuler dans un langage personnel les thèmes,
voire les obsessions et les fantasmes qui sont les leurs, et à approfondir une
recherche qui se veut subjective.
Les interrogations que ces créateurs essaient d'exprimer par des images touchent
souvent à l'essentiel : au devenir des sociétés auxquelles ils appartiennent, alors en
pleine mutation, à la possibilité qu'a l'individu moderne de maîtriser les
contradictions psychologiques qui l'habitent et de trouver un véritable équilibre,
voire au sens qu'il peut donner à sa vie. Certains de ces cinéastes se sentent très
proches de la psychanalyse, et tentent même de surmonter par la création leurs
propres névroses, certains aussi sont sans le dire des sortes de philosophes-artistes,
proposant une vision relativement cohérente de la condition humaine.
Cette étude met en parallèle quatre monstres sacrés du cinéma d'auteur de
l'époque - Bergman, Fellini, Buñuel, Truffaut -, sans oublier deux représentants
du cinéma italien de la génération suivante, Scola et Moretti. On est forcé de
constater que, même si leur rayonnement reste fort, leur démarche, qui était en
leur temps déjà marginale, l'est sans doute devenue encore un peu plus
aujourd'hui : ils appartiennent d'une certaine manière à un passé révolu. Il faut
s'efforcer de savoir pourquoi.