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Jean-Luc Lagarce laisse au terme de
sa brève vie (1957-1995), une oeuvre
conséquente - vingt-trois pièces, deux films
vidéo, des récits, des essais, un journal -
dont on commence seulement à mesurer
l'importance et la profondeur.
Une oeuvre marquée par la mort
et la disparition (bien avant que l'auteur
soit atteint par le sida) dont le théâtre
(sa vie, ses coulisses, ses miroirs) est comme
le pivot et le bras séculier. En déjouant
le jeu de la représentation, de l'intrigue
et du dialogue, Lagarce invente
une écriture dramatique marquée par le récit
romanesque, le mal de dire, le temps filtré
à l'aune de la mémoire. L'arrangement
avec la vérité, la famille, toutes les familles,
l'amitié, l'amour, encore et toujours,
traversent cette oeuvre fulgurante marquée
par le sceau de l'intime qui renvoie à la vie
de chacun, lecteurs et spectateurs.
La causticité, la satire sociale ne sont pas
en reste au creux de cette écriture
protéiforme. Comme Tchekhov, dont il est
le légitime héritier, Jean-Luc Lagarce croyait
souvent écrire des pièces drôles, là où
ceux qui les lisaient ou en signaient la mise
en scène voyaient d'abord des drames.
La postérité met tout le monde d'accord,
postérité, qu'au demeurant, Lagarce
met volontiers en scène.