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La Jeune Fille sans mains est le premier conte des frères Grimm
que Drewermann a interprété à la lumière de la psychologie des
profondeurs (1981). Ces contes évoquent de façon voilée le passage
que nous vivons de l'enfance à la maturité. Et s'ils reprennent,
comme c'est le cas ici avec le parcours chaotique de la lune, des
traits caractéristiques de la mythologie cosmique, il ne faut pas lire
cette dernière comme le sceau du fonctionnement de l'âme humaine
mais, inversement, comme un reflet de celui-ci.
Ce conte symbolise le chemin que doit parcourir tout être
humain pour se défaire de la culpabilité d'exister (cette culpabilité
qui le prive de ses «mains») et accéder à une liberté à laquelle le
convie la grâce. Chemin fait de souffrances et de déchirements, de
courage et d'illusions, de solitude extrême et d'amour infini. Ce
n'est que par une justification venue d'une «personne» qui n'est
pas une personne humaine que les êtres humains peuvent tisser
entre eux des liens qui ne les enchaînent pas dans une logique de
dépendance et de culpabilité. Ils ne trouvent le chemin l'un vers
l'autre - évitant les écueils de la diabolisation ou de la divinisation
réciproque - qu'en empruntant la voie de la liberté, en se mettant
à l'écoute de l'«ange» qui les conduit à la «maison de la grâce».
C'est aussi le conte qui est le plus cité dans Fonctionnaires de
Dieu, puisqu'il défend, en positif, la nécessité de se trouver
soi-même au-delà de toute «dépersonnalisation».