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Les savants et linguistes venus de Hongrie, de Finlande puis d'Estonie ont
parcouru au XIXe siècle les plaines de la Volga, les contreforts de l'Oural et la
Sibérie occidentale, dans des conditions difficiles, souvent au péril de leur santé,
pour recueillir les preuves matérielles de l'existence de leurs peuples frères : la fin
du siècle précédent venait de révéler, puis de confirmer, l'existence des peuples
ouraliens et finno-ougriens, jusque dans les terres reculées de la Sibérie - des
peuples que les anciens avaient ici et là évoqués comme des énigmes, puis oubliés
aux marches des terres connues.
On a découvert alors des cultures riches, complexes, portées par des hommes
simples, fiers chasseurs ou modestes paysans. Ces cultures ont traversé tant
bien que mal des siècles de turbulences extrêmes, entre les vagues germaniques,
turkmènes et russes, reculant ici, se rebellant là, mais préservant de grands pans
de ce qui fait leur saveur unique.
Lamartine et Victor Hugo ont exprimé en leur temps une admiration sincère
devant la puissance des chants des Caréliens et des Finnois : dans la même veine
que ces chants ancestraux, issus du même creuset, ce volume des Chants ouraliens
livre au lecteur un complément précieux à sa connaissance des cultures humaines
originales - c'est une moisson de chants, poèmes, complaintes, incantations et
mythes de la «Yougrie», comme la nommèrent d'anciens géographes, un pays
qui n'a sans doute jamais existé politiquement, mais dont la noblesse passée est
attestée par la qualité, la puissance et l'originalité du trésor poétique et culturel
de ses peuples, les Ouraliens.
G. R.