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Une réflexion morale libre de toute dépendance à
l'égard du religieux, irréductible au naturalisme et à l'économisme
est-elle encore possible ?
En ce début de XXIe siècle, on parle beaucoup de «valeurs
morales». Mais ce que ces deux mots recouvrent, chez ceux
qui les emploient le plus fréquemment et le plus bruyamment,
ce sont des engagements de nature plus religieuse
que morale contre le droit de choisir sa mort ou d'avorter,
la recherche sur les cellules embryonnaires, le
mariage gay ou lesbien etc.
De nombreux savants et philosophes se proposent d'expliquer
tous nos comportements en examinant leurs fondements
«naturels», c'est-à-dire leur base physique ou
génétique. Tout y passe : la timidité, la gourmandise, la
joie de vivre et le «sens moral» aussi ! D'autres voudraient
appliquer le modèle de l'agent rationnel ou égoïste à
toutes sortes de conduites apparemment non économiques
comme les choix amoureux ou les comportements
dits «moraux» ou «altruistes». Mais ces programmes
naturalistes ou économistes aboutissent à
l'élimination de la réflexion morale plutôt qu'à une
meilleure compréhension de ce qu'elle est.
Dans ces conditions défavorables, la question de l'avenir
d'une réflexion morale non religieuse, irréductible au
naturalisme et à l'économisme peut en effet se poser.
Je voudrais donner des raisons de ne pas y renoncer.
Ruwen Ogien