Read more
Fulgurante figure de la mystique en Islam, Hussein Mansour al-Hallâj
appartient à cette rare pléiade de poètes pour qui la poésie fait
un avec la pensée. Cela ne saurait se produire que si la poésie est
sublime et la pensée profonde. Cependant, puisque Hallâj est
avant tout un mystique, un des plus grands de tous les temps,
l'unité de la pensée et de la poésie chez lui trouve sa justification
dans une expérience de la totalité qui sert à exprimer une relation
unique à l'Unique. Expérience non mutilée, non mutilante,
où l'âme coexiste avec le corps, la raison avec ce qui la nie, la finitude
de la mort avec l'horizon de la résurrection, et où le coeur et
l'imagination, portés par cette force transfiguratrice qu'est
l'amour, deviennent des moyens de connaissance, des sens véritables.
La poésie est inséparable de la vie, une vie tout entière tournée
vers l'Unique, Lequel unifie mais dans le déchirement, fait accéder
au vrai mais dans la contradiction, permet de Le retrouver et
de se retrouver mais dans le dépassement de tout. La poésie, chez
Hallâj, est la forme suprême que, provisoirement, juste avant le
silence ultime, la pensée prend quand elle doit se dépasser dans
l'indépassable.