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À la fin des années 50, Ôé Kenzaburô s'affirme comme
l'enfant terrible des lettres japonaises. Son inspiration
exprime le frénétique «mal de vivre» d'une «génération
perdue» marquée par le souvenir de la défaite. Au cours
de l'été 1963, le jeune romancier voit commencer pour lui
une «vie nouvelle» : la naissance de son premier fils lourdement
handicapé, la rencontre des victimes de Hiroshima
lui découvrent l'absurdité cruelle d'un Mal dont son oeuvre
romanesque, couronnée par le Prix Nobel en 1994, ne va
cesser de questionner la signification. Les livres de Ôé
offrent au lecteur européen l'image d'un autre Japon où
modernité et tradition se mettent au service d'un humanisme
paradoxal et subversif. On connaît le célèbre mot de
Nietzsche selon lequel nous avons l'art pour ne pas périr
de la vérité. Toute la réflexion de Ôé est dominée par une
question semblable : comment survivre à la vérité, car si la
douleur dévastatrice du vrai doit être dite, il faut que cette
douleur soit aussi douceur afin de préserver celui qui la
contemple de la destruction sans retour de son être.
Le présent volume constitue la version actualisée et augmentée
de l'essai de Philippe Forest paru en 2001. Il prend
en compte certaines des oeuvres portées à la connaissance
du public occidental ces dix dernières années.