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Grignola e l'umanità in versi, « Grignola et l'humanité en vers » : l'expression de Renato Martinoni révèle moins l'ambition de l'oeuvre que le constat qu'établit sa lecture, et que reflète le titre choisi pour cette anthologie, Toute la vie, en hommage au poète disparu en août 2022.
On y trouvera le portrait de la réalité aussi bien rurale qu'ouvrière d'une région qui résume en elle-même, dans l'histoire de ses transformations, celle du monde moderne chassant celui d'autrefois tout en éprouvant pour lui la plus profonde nostalgie. D'un côté, un pays riche de parfums et d'harmonies, lié au rythme lent et précis des saisons et des activités humaines ; de l'autre, les cadences et les objets de la société contemporaine, qui aboutissent à l'irrespect de cette tradition naturelle, aux faux mythes, aux malheurs de la vie quotidienne, à la « maladie de vivre » que fait naître un monde de guerres et d'injustices éloignant l'homme de ses propres richesses. Mais cette tension entre le monde des racines et l'univers de la standardisation a chance de susciter en chacun l'impérieux besoin d'une intimité où éprouver la possibilité d'un dépassement - la poésie ayant peut-être pour tâche et pour grandeur de rappeler ce besoin et de lui donner voix. Une voix qui a choisi l'étrange et puissante humilité du dialecte pour rester proche de la réalité qu'elle évoque : « Le dialecte », écrit l'auteur, « est comme la sève qui à la fin de l'hiver accélère puissamment la résurrection de la plante, et qui vous fait accéder à des images, des événements, des visages, des voix, des odeurs et des parfums lointains, presque imperceptibles, comme d'une langue retrouvée dans sa pureté. »
