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Algorithme René : T'es en retard.
Benoît : L'algorithme, c'est dieu.
Algorithme René : Alors pédale. La tête dans le guidon. Ne regarde pas la ville. Traverse-la de part en part. Emprunte ses boulevards, ses avenues, ses rues et ses impasses. Connais ses raccourcis. Récupère des repas dans toutes ses brasseries, dans tous ses restaurants et dans tous ses fast-foods. Sonne à tous ses interphones. Tape à tous ses digicodes. Pousse toutes ses portes. Mais la ville, ne la regarde pas.
Benoît : Je ne la regarde pas.
Algorithme René : Une fois tu as levé la tête. Tu t'en souviens de cette fois-là ?
Benoît : J'ai fait ça machinalement, sans réfléchir.
Algorithme René : « Chers citoyens, la ville vous appartient », et sous les mots en gros, en gras et en couleurs : deux visages heureux.
Benoît : Deux visages tout sourire à pleines dents.
Algorithme René : C'était...
Benoît : ...blessant.
Car vraiment la ville elle ne m'appartient pas. L'inverse : c'est moi qui appartiens à la ville.
A chaque fois que les portes s'ouvrent, Monsieur S. s'étonne de n'avoir pas changé d'étage. Il appuie pourtant sur le bon bouton. Il suit minutieusement les indications écrites dans la cabine. Il écoute les instructions du technicien en ligne. Il le sent, l'ascenseur monte. Mais quand les portes s'entrouvrent, Monsieur S. ne peut que constater qu'il est encore au rez-de-chaussée.
Et si Monsieur S. était condamné à ne jamais s'élever... ?
Dans cette relecture socialo-loufoque du mythe de Sisyphe, rien d'étonnant à ce qu'un paysan du Moyen Age se confonde avec un livreur Delivrero ou qu'un moine franciscain ait des allures d'algorithme. Car si les Sisyphes changent au fil du temps, le châtiment perdure.
