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Les Européens ont l'habitude d'appeler sauvages les autres,
les non-civilisés. Pourtant, du XVIe au XIXe siècle, le Nouveau
Monde est devenu pour certains d'entre eux la Terre d'avant la
Chute, celle des bons sauvages et de la nature vierge, celle de
Satan aussi. Les pouvoirs et les confessions se sont emparés de
ces images en France pour contrôler les territoires lointains, non
pour détruire les Indiens mais en alliance avec eux contre les
autres. Mais ils ont poursuivi ce contrôle sur leurs territoires
proches.
Ce livre, qui réunit dix-huit contributions de spécialistes,
nous montre que pour les missionnaires et les militaires,
les protestants et les catholiques, le sauvage n'est pas toujours
d'un même côté de l'Atlantique. Alors que la France se décide
à domestiquer ses terres américaines, elle découvre ses propres
«idolâtres baptisés», ses sauvages des campagnes françaises. Le
prisme confessionnel nous permet de circuler entre les deux
pôles en fournissant une masse documentaire considérable qui,
croisée avec les humbles données matérielles de l'archéologie,
traque les malentendus et les manipulations ultérieurs de l'histoire.
La France en Amérique et l'Amérique en France entreprennent
une histoire inattendue quand elle n'est pas relue avec les
oeillères coloniales. On est toujours le sauvage d'un autre.