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Le génocide des Arméniens en 1915, fait historique établi de façon probante
et certaine, sollicite la matière juridique. C'est à partir de cet événement
qu'a été fondé le concept de crime contre l'humanité en tant
qu'infraction pénale internationale et le problème de la négation du
génocide par la Turquie n'est toujours pas réglé.
Si le crime contre l'humanité est entré dans le droit positif en 1945 au
procès de Nuremberg, il faut remonter à la déclaration des Alliés du 24
mai 1915 adressée à l'Empire ottoman qui dénonçait «les crimes contre
l'humanité et la civilisation» commis à l'encontre des Arméniens pour
en saisir l'origine. Mais, alors qu'en 1920 le traité de Sèvres prévoyait un
tribunal international pour juger les responsables des massacres et
déportations, il ne fut jamais ratifié et le traité de Lausanne de 1923
établit, en annexe, une clause d'amnistie générale pour tous les responsables
turcs qui ne furent jamais inquiétés. Seuls eurent lieu
quelques procès, ersatz de justice, tenus par des cours martiales ottomanes.
L'égoïsme des Etats et les tractations politiques l'emportaient
sur le souci d'une véritable justice internationale indépendante.
Aujourd'hui, l'Etat turc ne peut être contraint, ni à reconnaître le génocide
(la Commission européenne n'en a pas fait une condition sine qua
non d'entrée de la Turquie dans l'Union), ni à verser des indemnités ou
à opérer des restitutions, même s'il peut être tenu pour responsable des
massacres, destructions et spoliations commis sous l'Empire ottoman.
Cependant, le droit fait évoluer la situation : la loi du 29 janvier 2001
portant reconnaissance par la France de ce génocide crée une norme de
droit juridiquement constituée au-delà de sa portée symbolique. Des
propositions de lois, en cours d'examen, visent à étendre au cas arménien
la responsabilité pénale pour contestation de crime contre l'humanité.
L'une d'elles devait faire l'objet d'un vote le 18 mai 2006 mais
son examen a été reporté. Le problème juridique posé par les événements
de 1915 n'est pas clos. La procédure d'adhésion de la Turquie à
l'Union européenne relancera nécessairement le débat.
L'ouvrage s'adresse aux spécialistes du droit international pénal, à la
communauté arménienne francophone à qui elle fournira des explications
inédites, et à tous ceux qui souhaitent en savoir plus.