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Des fois on sent quelque chose. Y a un moment où on le sent. C'est comme du museau de chien qui vous vient sur la peau, à renifler partout, sous les bras, dans les fesses, et dans le trou des jambes... Et on voudrait dire qu'on s'est trompée, qu'on joue pas dans la bonne pièce, qu'on n'avait pas bien compris les règles, que c'est des règles de mecs qui ont toujours eu le bon du jeu, depuis que le monde existe, depuis que la civilisation du monde existe, depuis que le dressing room...
Je le sais, parce que : « pourquoi Bichou, il était toujours le dernier à montrer son branlant de valets ou sa suite royale », qu'il disait : « avec en prime pour la nuit une jolie petite escort... ? » Et moi c'était jamais une suite, même une toute petite, il y manquait toujours le valet de paume ou le dix des rétamés.
Lol présente sur scène une collection de prêt-à-porter. Mais très vite la mécanique de son exhibition s'enraie à mesure qu'un souvenir envahit par à-coups sa conscience, souvenir d'une scène précise où elle s'était sentie progressivement prise au piège du regard de trois hommes.
Entre celle qui doit accomplir son travail de fashion sharing et celle qui glisse malgré elle dans la reviviscence traumatique, s'ouvre un espace de trouble.
Délaissant peu à peu le cérémonial de l'exhibition, Lol entraîne alors le spectateur vers une espèce de cérémonie intime où il s'agit pour elle d'aller jusqu'au bout d'un processus de mise à nu. Dans une lumière peu à peu déclinante, tenter d'être comme elle peut, non pas la Lol tout sourire façonnée par le regard des autres, non pas l'enfant du théâtre des apparences, mais celle qui tremble devant le gouffre noir et cherche à se dire en vérité.
