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Première femme de lettres ayant vécu de sa plume, Christine de
Pizan (1363-v.1430), fille d'un médecin italien du roi de France Charles V,
entra dans l'Histoire lorsqu'à vingt-sept ans, devenue subitement
veuve et sans ressources avec trois enfants à charge, elle décida
d'assumer un métier d'homme et de se consacrer à l'écriture plutôt
que d'entrer au couvent ou de se remarier.
Littéraires et féministes se sont emparés de la figure de cette
érudite hors du commun qui, en imaginant une Cité des Dames
idéale, secoua le joug pesant alors sur ses consoeurs et dénonça l'état
d'infériorité que la société mâle leur imposait. Elle créa le scandale
en critiquant la misogynie de Jean de Meun, l'un des auteurs du
célèbre Roman de la Rose, forçant ainsi par son courage l'admiration
du poète Eustache Deschamps et celle du théologien Jean de Gerson.
Initiatrice d'un premier humanisme né de la lecture de Dante et
Boccace, qu'elle contribua à faire connaître en France, elle se passionna
aussi pour les techniques de l'édition, au point de veiller elle-même
à la mise en page de ses manuscrits.
Seul le regard d'une historienne pouvait replacer le destin si
singulier de Christine au coeur de ce XVe siècle troublé par la folie
du roi Charles VI, la guerre de Cent Ans, le Grand Schisme et les
violences entre Armagnacs et Bourguignons. Habile, Christine sut
exploiter ce contexte mouvementé pour rédiger des traités politiques
engagés (Dictié de Jeanne d'Arc), qu'elle offrit à des protecteurs
puissants tels que Charles VI, Louis d'Orléans, Jean de Berry ou Jean
sans Peur. Le portrait stimulant d'une femme de tête et dame de coeur
dont les combats et le parcours exemplaire en inspirera plus d'une.