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«Sans le latin, sans le latin, la messe nous emmerde» chantait
Georges Brassens. Après lui, malheureusement, l'ennui a gagné
du terrain, à commencer par celui de l'école, au point que c'est
le sens même de notre langue qui finit par se perdre.
Le latin est la langue mère du français et la conscience de
l'Europe. Que goûter de la culture, que comprendre de l'histoire,
que savoir de la science et de son évolution, si l'on renie cette
filiation ?
Alors qu'on exalte le patrimoine avec fébrilité, on liquide, avec
une logique soft de taliban, tout ce qui fait l'enracinement du
français dans son passé. Sans le latin, c'est tout bonnement notre
«roman familial» qui devient illisible. Raconter cette histoire,
ce n'est pas idéaliser une sorte d'épopée nationale. C'est se montrer
d'abord attentif aux avatars linguistiques et littéraires d'un
français qui s'est édifié sous l'égide et la tutelle éclairée de la
langue latine.
Chasser le latin, comme on le fait actuellement dans l'enseignement
secondaire par toutes sortes de moyens directs ou détournés,
c'est désapprendre le français. Organiser la disparition des
filières qui permettaient de maintenir un bon noyau de langue et
de culture latines chez les enfants de France, c'est rendre inaccessible
aux générations futures notre patrimoine littéraire,
philosophique et historique ; c'est ramener le français à un simple
outil de communication, qui perd toute chance de s'affirmer dans
un monde dont la plupart des communications sont désormais
assurées dans un anglais pauvre mais commun. On peut rêver :
quel président, quel ministre courageux oseront enfin renverser
la tendance en instituant le fait latin à l'intérieur même de l'enseignement
du français ?