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Rien ne distingue l'affabulation comique telle qu'on la rencontre au café du commerce,
de l'interprétation mystifiante de son passé par une société ou par ses historiens : leur
mécanisme est identique : c'est la métonymie, c'est-à-dire prendre la partie pour le tout.
La fantasmagorie mythomaniaque donne sa tonalité caractéristique à l'âme polonaise.
Négativement ou positivement, elle règle la vision que ce peuple se donne de son sort,
y lisant tantôt une Épopée, tantôt une tragédie. Dans ces deux cas, il se targue d'un rôle
exceptionnel, messianique ou rédempteur, quand ce n'est pas celui du Peuple élu,
nonobstant sa détestation profonde et séculaire des Juifs. «Pays de Fanfarons ou pays des
Seigneurs», professait Kant dans son Anthropologie... D'où un curieux fatalisme face à
l'injustice (dont une minorité sait si bien tirer profit), appuyé par un catholicisme rétrograde
dont les jours semblent néanmoins comptés.
Ce livre s'ouvre sur une scène de Café du Commerce et se clôt par la lecture de la presse
polonaise et établit, à travers Histoire et lecture de la littérature polonaise (nombreux
extraits), un portrait cohérent d'un pays qui a tendance à s'illusionner sur lui-même.