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Bourranflé, diagalange, montigené, grillottement... ce sont des
mots français, mais on ne les trouvera ni dans le Dictionnaire de
l'Académie, ni dans le Robert, ni même dans le Trésor de la
langue française. Ces mots, comme quelques milliers d'autres,
seraient sans doute perdus à tout jamais s'ils n'avaient pas été
consignés, il y a 400 ans, dans un dictionnaire fait par un véritable
amoureux de la langue française - mais qui avait, pour la postérité,
le tort d'être anglais. Randle Cotgrave, originaire de Chester,
avait mis à profit son poste de secrétaire auprès d'une grande
famille anglaise, les Cecil, pour dépouiller tous les livres qui lui
tombaient sous la main et pour enregistrer les mots qu'il en extrayait,
assortis de leurs traductions ou d'équivalents, de gloses et de
remarques diverses (souvent savoureuses), dans son monumental
Dictionarie of the French and English Tongues de 1611. Trop peu
normatif pour la tradition lexicographique française du début du
XVIIe siècle, lorsqu'enfin Malherbe vint, le dictionnaire de Cotgrave
avec ses 48 000 entrées est resté largement ignoré par les historiens
de la discipline jusqu'à une date récente. Et pourtant, au fil
de plus de 900 pages, d'Aachée à Zummach, combien de trésors
défilent devant nos yeux : plus de 4 000 noms de plantes, des
recettes de cuisine, des proverbes et des entrées encyclopédiques,
dont plus de sept pages dédiées au seul mot Droit.
En décembre 2011, à l'occasion du 400e anniversaire de la
publication de la première édition du dictionnaire de Cotgrave à
Londres, dictionnaire réédité chez Honoré Champion en 2001,
un colloque international tenu aux universités de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines
et Cergy-Pontoise a rassemblé des
chercheurs de plusieurs disciplines autour de ce véritable monument
de la lexicographie bilingue. Ce volume présente le texte de
leurs communications, avec des index, une bibliographie complète
et des notes biographiques inédites, pour enfin sortir
Randle Cotgrave de l'ombre.