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«Je vivais depuis quinze ans en Inde. Jamais je ne m'étais soucié de
spiritualité, j'étais bien trop occupé à faire prospérer mon affaire.
J'avais des voisins brahmanes, la caste traditionnelle des prêtres dans
la hiérarchie hindoue. Une femme brahmane surtout attirait mon
regard. Je l'admirais de loin quand elle retroussait son sari, le passait
entre ses jambes pour apprendre à son fils à faire du vélo. Elle m'invita
chez elle et, entre deux gâteaux de riz fermenté, me parla de respiration,
méditation et me prêta un livre, un seul : «Paroles de
Ramakrisna». Ce fut l'illumination, je venais de découvrir un trésor.»
Rien ne prédestinait Christian Fabre, né à Béziers d'un père cheminot
et d'une mère couturière, à se retrouver en Inde. À 25 ans, il est
employé d'une société de cuir à Madras, 20 ans plus tard, après la
rencontre déterminante d'un maître spirituel, il est devenu Swami
(Sage). Il a été ordonné moine hindou et est resté PDG de la première
société de «sourcing» du Sud de l'Inde qui fournit quelques-uns des
plus grands noms du prêt-à-porter européens. Il donne du travail à plus
de 60.000 personnes réparties dans 23 usines.
Aujourd'hui, Swami Pranavananda Brahmendra a fondé son ashram
sans renoncer à diriger sa société. Il a fait don de tous ses biens à ses
associés et ne possède plus rien en propre, pas même la maison où il
habite. Il partage sa vie entre le temps des décisions stratégiques professionnelles
et le temps du repli sur soi et de la méditation suivant le
précepte de son gourou : «C'est dans la vie matérielle qu'il faut introduire
le spirituel.»
Son expérience est riche d'un enseignement profitable pour tous. Il
nous confie comment l'homme coléreux, dépressif, dépendant du tabac
et de l'alcool a appris à discipliner ses pensées, à respirer dans chaque
partie de son corps, à apprivoiser ses émotions. Son ton est simple et
direct, son témoignage d'une absolue sincérité.
Est-il plus heureux qu'avant ?
«On n'est pas plus ou moins heureux, répond-il. On est heureux ou
pas. Je le suis.»