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La science politique moderne n'est pas la science politique des modernes. La
science politique moderne l'a recouverte et enfouie. La science politique des modernes
ressurgit cependant là où l'on ne l'attend pas : dans la pratique des sciences
sociales, pour autant qu'une vision du social s'y trouve engagée que la sociologie
explicite dans sa signification et sa portée politiques.
Telle est la thèse qu'avance ce livre, en revenant aux fondations que Durkheim a
su donner à cette science, pour en préciser le sens et en montrer la pertinence toujours
actuelle. Ce que vise en propre la sociologie et qu'elle cherche à instaurer par son discours,
c'est un certain rapport à l'action. Car le social qu'elle s'attache à objectiver
est lui-même de cette nature : non pas un ordre réalisé, mais un processus toujours
en cours dans lequel on agit, sur un plan inséparablement scientifique et politique.
De quelle action s'agit-il alors ? De celle conduite à l'intérieur de la division du
travail, animée par un idéal d'autonomie de la personne qui demande à être sans cesse
clarifié.
La science politique des modernes rejoint ici sa nécessité. Elle nous aide à mesurer
la distance qui sépare encore nos sociétés de leur plus profonde aspiration : devenir
des sociétés démocratiques, capables de se gouverner elles-mêmes dans et par
l'institution libre et juste du social. C'est à cette reformulation du projet d'autonomie
qu'aboutit la sociologie, lorsqu'elle reste fidèle à la vocation critique que lui assigne
son inscription dans la modernité.