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Érudit libertin, ami de La Mothe Le Vayer et de Gabriel Naudé,
grands noms de la Raison d'État et de l'absolutisme monarchique,
Gramont écrit son Denier royal guidé par un objectif :
démontrer que le pouvoir d'achat des ressources financières du
Roi n'a pas augmenté depuis Charles V.
Si l'on veut abattre le lieu commun selon lequel impôts et taxes
ne cesseraient d'augmenter et le peuple de s'appauvrir, il faut
impérativement construire une théorie de la valeur permettant de
définir le pouvoir d'achat du revenu des particuliers, des princes et
de la nation. L'entreprise nécessite de distinguer rigoureusement
augmentation des prix et cherté. Bodin, comme Malestroict,
confondent la mesure de la richesse avec la richesse elle-même.
C'est l'abondance ou la rareté des biens satisfaisant aux besoins
des hommes qui permet de savoir si ces biens sont devenus plus
chers, en aucun cas la quantité de métaux précieux qu'il faut céder
en échange. Cela a-t-il un sens de dire que depuis trois cents ans,
le royaume de France n'a cessé de s'appauvrir ? Voilà Bodin et
Malestroict renvoyés tous deux «aux erreurs populaires» à cette
propension des hommes à penser que tout va de plus en plus mal,
que le temps se dégrade, que la pauvreté s'accroît, que les
hommes sont de plus en plus mauvais, que les terres sont de
moins en moins fertiles. Cette remise en question radicale lui
fournit une méthode qui l'amènera à répondre aux questions suivantes
d'une façon tout à fait originale :
Comment convient-il de définir la richesse et la monnaie ? Quels
rapports entretiennent-elles ?
Qu'en est-il de la cherté ? Est-elle réelle ou supposée ? Comment
expliquer la diminution de la valeur estimative de la monnaie ?
Quelle est la bonne méthode pour étudier les mouvements des
prix et des revenus ?
Comment les revenus du roi ont-ils évolué ? Quelles sont les
causes du mécontentement du peuple ? Comment y remédier ?