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Installé à la terrasse d'un café,
un vieil homme, David Farman,
se souvient... Il se souvient de ses jeunes années dans
l'atelier de couture de son père, son premier emploi
au Carreau du Temple auprès d'un commerçant de
tissus et de vêtements, la reprise de ce négoce au nom
des Farman. Il se rappelle aussi ses virées dans les bals
avec les copains, ses rencontres féminines. Et puis lui
reviennent en mémoire les dures années d'Occupation,
son combat contre le nazisme et son soutien aux Juifs
après la guerre. Aujourd'hui, le vieil homme peut tirer
sa révérence, le sentiment du devoir accompli...
Seul face à son destin...
L'ombre étirée du vieil homme se projetait devant lui.
Il marchait comme s'il voulait la piétiner, pareil à ces
moments où, petit garçon, il essayait en vain de la rattraper.
Ce souvenir le fit sourire. Cette ombre fuyante, il
la connaissait bien, c'était la même après laquelle il avait
couru toute sa vie sans jamais l'atteindre, sans jamais
l'étreindre. Ce morceau de lui-même qui lui donnait
l'envie de courir, d'espérer, de se battre. Tout au long
d'une longue vie où les combats avaient été multiples, où
l'ambition de gagner était si forte qu'il avait réussi, parfois,
à atteindre son but. Aujourd'hui cette ombre n'était
plus un défi, mais le souvenir d'une complicité qui l'avait
toujours accompagné dans sa solitude. Il s'en était fait une
alliée et, tout en souriant, se disait qu'elle ne le quittait
pas, qu'elle ne le quitterait jamais.