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«J'ignore quels buts se propose l'éducation civilisée,
je n'en ai guère lu les traités, mais à en juger par le
résultat, le premier et le plus général chez les enfants
civilisés, est qu'ils n'usent de leur liberté que pour
commettre toutes sortes de dégâts, s'exciter l'un
l'autre à la malice et la malfaisance, à tel point qu'une
troupe d'enfants qu'on laisserait en pleine liberté,
sans crainte des châtiments, finirait par se donner
le délassement de Néron, incendier une ville.»
Ce n'est pas au lendemain des «émeutes» de novembre
2005 que ces lignes ont été écrites, mais il y a près de
deux siècles, en 1821, par Charles Fourier. Loin du ton
de menace ou de lamentation de nos politiques et de
nos pédagogues, elles débouchent sur une mise en
cause directe, ferme et humoristique à la fois, de la
«civilisation» c'est-à-dire de la société et de son système
éducatif. La violence des enfants et notre désarroi
devant elle ont une même source : dans un ordre «subversif»,
celui de la société industrielle et marchande.
Les textes de ce recueil, réquisitoire mordant et passionné
contre les contraintes imposées à l'enfant et
à ses passions, indiquent la voie de la raison : libérer
les impulsions et attractions spontanées, et les
orienter en vue du bien commun. «Ni père, ni
maître», telle pourrait être la formule de cette éducation
harmonienne.