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«J'ai tant aimé les Arts que je suis artilleur» écrivait Guillaume
Apollinaire, engagé volontaire dès 1914.
L'écrivain aux identités multiples, apatride patriote, soldat français
au nom étranger, fait l'expérience des combats, de la peur, de
la souffrance. Blessé à la tête - l'image héroïque du bandage est
promise à une belle postérité, bien plus que la grippe espagnole
qui l'emporte en 1918 -, il reste mobilisé à Paris. L'amoureux (Lou,
Madeleine, Jacqueline), l'écrivain, le journaliste, le censeur, participe
à la mise en forme publique, à la construction et reconstruction de
l'immense événement 14-18. Lequel, en retour, nourrit son oeuvre
d'écrivain et de critique d'art, l'amène à pousser au plus loin les
frontières de l'avant-garde, de l'artisanat de tranchée au ready
made en passant par Les Mamelles de Tirésias. À ses côtés, on
croise, entre autres, Picasso, Tzara et Cendrars, Ernst, Duchamp,
Larionov, Breton, Éluard, Chagall et Delaunay, Cocteau, des
engagés volontaires et des embusqués, des anonymes qui ont partagé
son quotidien dans les tranchées ou sur le front domestique.
La correspondance de guerre de l'écrivain, ses écrits divers ne
sont largement connus ou rétablis que depuis quelques années et
le récit dans lequel il avait été enfermé est ici modifié. En un jeu
de miroirs, le poète en guerre, combattant à la fois extraordinaire
et banal, permet de mieux comprendre le conflit. Le suivre, c'est
construire une guerre bien à lui, à l'aune de ses certitudes, de ses
anxiétés, de ses rejets, et une guerre qui appartient à tous.
La mémoire de son engagement et de sa blessure ont hanté des
générations d'artistes et d'écrivains, français ou étrangers, qui
continuent à s'interroger sur la Grande Guerre.