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Qu'est-ce que croire ? Et surtout : qu'est-ce qui fait que l'on peut
basculer du doute au refus, voire au rejet, de toute croyance ? La
croyance, d'ailleurs, ressortit-elle nécessairement à la crédulité ?
C'est à de telles questions, toujours actuelles, que l'étude de
l'oeuvre du baron d'Holbach (1723-1789) nous confronte. Encore
faut-il ne pas caricaturer la démarche de l'athée le plus conséquent
des Lumières. Ce travail vise donc, en premier lieu, à rectifier
l'image de dogmatique tonitruant dont il est affublé. Une étude rhétorique
de son oeuvre invite à repérer dans son activité clandestine
de propagandiste de l'hétérodoxie une stratégie de prosélytisme
qui retentit sur l'expression même des idées et des thèses. Pris
entre l'impossibilité légale de soutenir en son nom une conception
du monde sans Dieu, et le souci de ne pas effaroucher le lecteur
que peut gêner le caractère radical de l'athéisme, le baron a mobilisé
traduction, éditions de manuscrits et oeuvres originales pour
construire une façon neuve de poser la question de l'incroyance.
L'organisation du corpus holbachique trahit une représentation de
l'incrédulité particulière qui fait de l'athéisme l'horizon ultime,
mais pas nécessairement explicite, de toutes les formes de contestations
de la religion prenant la raison pour guide. Le baron peut
ainsi engager la bataille contre le déisme, considéré comme inconséquent,
mais soutenu par la plume virtuose de Voltaire : face à
elle, et avec l'aide de Diderot, bien qu'on n'en sache pas exactement
l'étendue, Holbach, souvent vilipendé pour la lourdeur de
son écriture, tente de bâtir un art de persuader entre clarté et éloquence.