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Face à la «crise des valeurs» et à la «perte des repères», l'individu
semble être devenu le dernier rempart. Création de la modernité,
l'autonomie du sujet social est perçue comme le symbole même de
la liberté. C'est ce mythe inquestionné que Miguel Benasayag remet
en cause dans ce livre iconoclaste. Pour lui, loin d'être cette instance
transhistorique et transculturelle, l'individu est une forme d'organisation
sociale, d'une vision du monde qui n'a rien de fatale. Et ceux
qui, avec la meilleure volonté du monde, s'efforcent aujourd'hui de
recréer du lien social entre les individus pour sauvegarder la vie face
à la destruction capitaliste, ne font que renforcer la logique qu'ils
pensent combattre : car dans le néolibéralisme avancé, l'individu est
précisément le constituant du lien social régi par la loi du profit et de
l'intérêt, l'atome indivisible de la massification.
Pour sortir de cette double impasse, il faut, explique Miguel
Benasayag, «abandonner la position du mirador» : celle de celui qui
regarde le monde en situation d'extériorité, comme depuis un mirador.
Position qui est aussi bien celle du réaliste tenant de la «pensée
unique» - le monde est ce qu'il est, nous n'avons d'autre choix que
de «faire avec» - que celle de son adversaire idéaliste - ce monde
est inacceptable, changeons les mentalités et tout deviendra possible.
Au fil d'un parcours philosophique aussi exigeant que passionnant,
Miguel Benasayag propose ici une théorie de l'émancipation constituant
un outil précieux pour tous ceux explorent les voies d'un
renouveau de l'action politique.
«Le monde devient, écrit Miguel Benasayag, "complexe, insaisissable,
inquiétant, de plus en plus virtuel, violent, lointain..." Seul surnagerait
l'individu, prétendument autonome, qui concevrait le monde comme un
objet à dominer. C'est ce nouveau mythe qu'il déconstruit.» Politis