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Le républicanisme n'est pas français.
Inventé par la cité libre grecque, nourri par les cités-États libres de
l'Italie de la Renaissance ou la république de Hollande du XVIIe siècle,
porté par les courants antimonarchistes de la Révolution anglaise, les
colons révolutionnaires de l'Indépendance américaine ou les courants
radicaux de la Révolution française, il est la manière la plus ancienne de
penser la liberté politique : la liberté comme non-domination, c'est-à-dire
comme l'absence de subordination à - ou d'interférence de la part de -
une autorité susceptible de devenir arbitraire.
Telle est la raison pour laquelle toutes les Révolutions occidentales
l'ont étouffé, dès lors que l'extension de la citoyenneté au-delà de la communauté
des possédants masculins aurait conduit à octroyer à tous les
citoyens - femmes et serviteurs - la liberté, au sens ancien.
Restituer l'histoire du républicanisme comme idée de liberté et non pas
comme simple régime politique, c'est exhumer d'abord un ensemble cohérent
de présupposés centraux dans le développement de la vie politique
européenne, antérieurement à la Révolution française. C'est, à partir de
ces présupposés, élaborer ensuite une philosophie néorépublicaine qui entend
défendre une conception du gouvernement distincte de celle propre
aux perspectives libérale et populiste.
C'est soulever, enfin, la question de la particularité du républicanisme
français : Sieyès est-il fidèle au républicanisme lorsqu'il remplace le discours
du peuple par celui de la nation ? L'insistance sur des notions aussi
centrales que celles de peuple unitaire et de nation unitaire permet-elle de
défendre les objectifs républicains : l'instauration d'une communauté et
l'accomplissement de l'égalité ? Quelle est la signification constitutionnelle
de l'appel à une souveraineté du peuple ou de la nation ? Est-il compatible
avec le fait de limiter ce qui pourrait être imposé suite au résultat d'une
décision plébiscitaire ou parlementaire ? Si c'est le cas, le Conseil constitutionnel
sert-il plus adéquatement cet objectif que le système américain
de contrôle judiciaire ?
Telles sont là quelques-unes des questions que pose cet ouvrage. Il
contraint les «Républicains» français à sortir de l'Hexagone pour se
confronter à une tradition dont il n'est pas assuré qu'ils soient les
meilleurs héritiers.