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Les discours publics sur les prisons sont généralement structurés par
une série d'«évidences» qui masquent les réalités quotidiennes de
la détention et de ceux qui la traversent, et réduisent à néant l'effort
d'analyse et de compréhension du fonctionnement socio-symbolique
de l'institution. Pour rompre avec ce réductionnisme intellectuel,
Gilles Chantraine propose, à travers un travail de terrain approfondi
constitué d'une série d'entretiens biographiques réalisés en maison
d'arrêt, une réflexion originale.
Ainsi, les trajectoires sociales des détenus, le fatalisme radical
des uns, la révolte et le «professionnalisme» des autres, la chute
sociale de l'agresseur sexuel, l'apprentissage de techniques
délinquantes en prison, les stigmates corrélatifs à l'enfermement,
les consommations massives de produits psychotropes, la structure
sécuritaire et oppressive de l'institution, l'économie relationnelle entre
surveillants et détenus, l'inégalité des conditions de détention, font
l'objet d'une analyse minutieuse.
La prison change-t-elle ? La prison peut-elle changer ? N'est-elle
qu'une machine à produire le stigmate ? Constitue-t-elle une partie
de la «solution» à la délinquance, ou plutôt une partie du
«problème» ? S'interrogeant sur la légitimité d'une institution qui,
intra muros, semble largement incompatible avec la dignité de
l'individu démocratique moderne, l'auteur suggère que les véritables
réformes carcérales se feront par-delà les murs, par le réancrage
des questions des sécurités au coeur d'une réflexion politique,
d'un projet de société.