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«Dans quel état m'as-tujetée ! J'aime pour la première fois,
pour l'unique fois», s'écrie Manon Phlipon à l'intention de
Jean-Marie Roland, qu'elle a décidé de prendre pour
époux. Pourtant, bien des obstacles s'opposent à leur
mariage. Il appartient à une famille de vieille bourgeoisie
provinciale prétendant à la noblesse, alors qu'elle est fille
d'un graveur du quai de l'Horloge, à Paris. Inspecteur des
Manufactures, Roland entreprend de longs déplacements,
ce qui ne favorise pas les relations suivies. Lors de leur première
rencontre, en 1777, elle a vingt-trois ans et lui quarante-trois.
Enfin, la jolie Manon ne ressemble guère à ses
semblables, élevées pour être des épouses soumises, des
mères dévouées et des maîtresses de maison accomplies.
C'est une intellectuelle qui se pense plus comme une héroïne
cornélienne que comme la petite bourgeoise idéalisée
par Greuze. Homme des Lumières, Roland incarne, à ses
yeux, une certaine forme de la sagesse antique. Mais que
pourrait apporter cette jeune fille exaltée à ce quadragénaire
placide ? Séduit par sa beauté et son intelligence, il ne
songe pourtant guère à l'épouser. Alors, l'inclination de
Manon se transfigure en passion. Dignes d'un roman épistolaire
à la manière de Jean-Jacques Rousseau, ses lettres
racontent une idylle compliquée où s'affrontent la voix de
la raison et les intermittences du coeur.