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Malgré l'influence considérable de ses théories et de son école, Kohut est encore peu connu en France. Le narcissisme a toujours été l'obstacle à la cure de certains patients, il devient un véritable moteur lorsque Kohut découvre l'existence de transferts narcissiques analysables. Cet ouvrage expose, discute et confronte les thèses de Kohut avec celles de Freud et celles d'auteurs postfreudiens, relance des aspects laissés en suspens dans la théorie du narcissisme.
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Juif viennois exilé à Chicago, il fait une découverte clinique : la possibilité d'un transfert narcissique, que Freud avait niée. Partant de ce manque de la théorie freudienne et de sa conséquence malheureuse, l'absence de guérison des pathologies narcissiques, Kohut en vient à une refonte complète de la métapsychologie freudienne, ce qui lui vaudra, à son grand dam, d'être excommunié par Anna Freud. Sa revalorisation du narcissisme, dont la place inférieure en psychanalyse tient selon lui à des motifs culturels et non scientifiques, passe par une distinction entre amour de soi et amour d'objet, concepts venus de Melanie Klein, Fairbairn et Winnicott. Seulement, à la différence des théoriciens de l'école des relations d'objet, Kohut insiste sur le versant positif du narcissisme, l'instinct de conservation de soi qui, unifié ou pas à un amour objectal, dure toute la vie, et qu'on ne peut en aucun cas réduire à une phase du développement infantile. L'analyse des pathologies narcissiques fait souvent ressortir des carences dans l'environnement des sujets, idée qui le rattache à la psychanalyse britannique. Mais ce défaut est étudié en termes de « réceptivité » et non forcément de chocs. C'est ce blanc qu'il faut découvrir dans la cure grâce à l'empathie du thérapeute. Kohut appartient au courant de l'intersubjectivité. Dans ces conditions, l'empathie est un outil essentiel du contre-transfert si l'on veut découvrir le « moi » du patient, son « self » authentique. A la différence des transferts névrotiques, le transfert narcissique aboutira à l'« intériorisation mutative » si l'empathie fonctionne bien. Sa redistribution des concepts freudiens a pour base un constat historique : depuis la fin du XIXe siècle, les pathologies ont évolué. Les tabous, qui portaient autrefois sur la sexualité, portent maintenant sur le narcissisme. Le psychanalyste doit s'adapter à ce changement. C'était d'ailleurs un souhait de Freud, que l'on puisse guérir les blessures narcissiques « si l'on pouvait modifier la méthode ». C'est ce que fit Kohut, qui aimait se comparer à Freud comme Max Planck par rapport à Newton. La présentation claire et ordonnée de Kohut par Agnès Oppenheimer permet de situer son influence dans les grands courants de la psychanalyse du XXe siècle. Etendre la cure aux patients non névrotiques suppose de changer d'outils et de méthode. C'est ce que voulait Kohut : ne plus « allonger le patient sur le divan de Procuste ».
(D. Berthezène)
Table des matières
PRÉSENTATION, 1
PREMIÈRE PARTIE
Le chemin de Kohut
Introduction, 9
Kohut : l'homme, le psychanalyste, 9
Le contexte psychanalytique, 15
Le narcissisme : un obstacle à la cure, 15 - Dans la mouvance de l'Ego Psychology, 17
Premiers pas, premiers jalons (1948-1966), 19
En deçà du conflit, 20 - Réhabilitation du narcissisme, 23 - L'introspection et l'empathie, 24
1. La psychologie du self restreinte. Une extension de la psychanalyse au narcissisme (1966-1971), 31
La plainte à la lettre : Mlle F*, 32 - Redéfinir le narcissisme : un nouveau continent, 33 - Pathologies narcissiques, 36 - Les transferts narcissiques, 38 - Le développement du narcissisme, 42 - Aspects métapsychologiques, 45 - Avatars du narcissisme, 48 - La cure, 51 - Les réactions de contre-transfert, 54 - La rage narcissique, 54 - Les transformations thérapeutiques, 56 - L'analysabilité du narcissisme et ses conséquences, 57
2. Transition (1972-1977), 59
Le narcissisme appliqué à l'histoire et à la cultu...