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Quel est le rapport entre le processus politico-institutionnel qui se déroule depuis une
cinquantaine d'années sous le nom d'intégration européenne et l'Europe, cette civilisation
qui avait connu pendant plusieurs siècles un développement remarquable et qui avait présidé,
au XIXe siècle, au développement de l'humanité, pour s'effondrer spirituellement et
politiquement au XXe siècle ? Voilà la question qui inspire la critique historique de l'idée
européenne dont l'ouvrage présent constitue le commencement.
Depuis des décennies, l'historiographie présente l'intégration européenne comme la
réalisation d'un rêve séculaire des nations européennes à former une union. Elle suggère
que ce processus aurait de nombreux et illustres précurseurs intellectuels depuis le
Moyen Âge. Cette mythologie, dont l'utilité politique est marginale, est très nuisible sur
le plan intellectuel. Elle falsifie l'histoire véritable de l'Europe, en faisant - abusivement -
de certaines conceptions historiques de la paix des préfigurations du fédéralisme
contemporain. Elle tue l'idée européenne authentique en méconnaissant la compréhension
de l'Europe comme identité et puissance.
La crise sans précédent que nous allons devoir affronter doit nous inciter à rejeter les
constructions idéologiques de l'Europe pour retrouver les fondements historiques qui,
seuls, pourraient encore donner un sens à cette civilisation qui semble bénéficier du
sursis que procure une décadence prolongée.
