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Par les termes d'aliénation et de passion je désigne deux
«pathologies» particulières des investissements qui n'appartiennent
ni au registre de la névrose ni à celui de la psychose. La force aliénante
comme l'objet investi passionnément ont l'étrange propriété
de satisfaire conjointement les visées d'Eros et celles de Thanatos : ils
rendent ainsi possible une précaire intrication pulsionnelle qui offre
un moment de trêve au conflit identificatoire.
La drogue, le jeu, l'autre dans la passion amoureuse permettent -
le temps de la rencontre - de fuir le conflit pulsionnel, de croire au fol
espoir d'avoir aboli tout danger de souffrance psychique. Espoir d'autant
plus fou que l'objet qui prête corps à une telle illusion porte en
lui un risque de mort effectif, telle est la prime exorbitante payée à
Thanatos afin que «du plaisir» reste possible.
La passion n'est pas simplement un excès d'amour, elle comporte
un changement qualitatif, elle transforme ce qui aurait dû rester objet
de plaisir et objet de demande en un objet qui vient prendre place
dans la catégorie du besoin.
Comment l'analyse, cette expérience qui se veut et peut être au
service de la désaliénation, réussit-elle à faire basculer les deux
partenaires dans une relation aliénante, à faciliter la tâche de ces
deux manifestations de la pulsion de mort que sont le désir d'aliéner
et le désir d'auto-aliénation ?