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Chalais, décapité à Nantes en 1626 ; le duc de Montmorency exécuté à
Toulouse en 1632 ; de Thou et Cinq Mars à Lyon en 1642... Au cours du
règne de Louis XIII, les procès politiques nombreux, souvent spectaculaires
et sanglants, ne cessent d'interpeller l'opinion : «on dit qu'il n'a
jamais pardonné à personne», écrit Pierre Vacherie, un greffier de
Limoges, à propos du cardinal de Richelieu qu'il rend responsable de tous
les malheurs d'un «règne de sang, de fer et de cruauté».
Rassemblés, commentés, combattus dès le moment de leur déroulement,
ces procès nous permettent d'observer et de comprendre les pratiques
d'un pouvoir politique alors en pleine mutation, un pouvoir qui a fait de
la puissance exécutive du prince et de la raison d'État le principal mode
de gouvernement. Ces pratiques, qui paraissent scandaleusement nouvelles
à bien des contemporains, s'inscrivent pourtant dans l'histoire
longue de la monarchie depuis le Moyen Âge.
À partir de sources nombreuses, diverses, souvent inédites, Hélène
Fernandez-Lacôte éclaire pour la première fois cette impressionnante série
judiciaire qui a marqué la construction de l'État absolu. Elle restitue la
violence et l'âpreté d'une époque et montre comment le cardinal-ministre
de Louis XIII est parvenu à user de tous les moyens à sa disposition pour
mettre en oeuvre ces grands procès, qui tout à la fois condamnent des
adversaires - ou d'anciens alliés devenus encombrants - et constituent
autant de moments de publicité du politique. Événement particulièrement
dramatique, l'exécution-spectacle en place publique est ici longuement
réexaminée. L'importance nouvelle des procédures de l'extraordinaire
- des façons inédites de gouverner, qui se déploient tant dans le domaine
financier que dans celui de la justice, et par là de l'administration - est
mise en valeur par l'étude de la sinistre Chambre de l'Arsenal dont l'activité
judiciaire est ici pleinement restituée : jusque-là mentionnée à l'occasion
de l'un ou l'autre procès, elle apparaît comme l'un des instruments
majeurs de la soumission politique et de la «fabrication» de sujets obéissants.
Dans ce livre consacré aux grands et aux moins grands procès organisés
par «l'homme rouge», la monarchie d'Ancien Régime, qui fut avant
tout un État de justice, est observée sous la lumière crue des châtiments
du roi.