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«La cuisine belge est mijotée, prolongée, poursuivie,
reconduite. Elle a fait de la répétition son rite. Prenez la frite,
par exemple, parangon du mets belge. Sa texture a son secret,
sa croustillance a son mystère, mystère jamais percé par ces
étrangers qui, à Rio ou à Tombouctou, s'épuisent à offrir à
leur clientèle de simples verges flaccides et graisseuses. Eh
bien, le secret est simple ; il s'énonce en une règle limpide :
à la maison comme à la friterie, la friteuse frit toujours deux
fois. Comment s'étonner que la Belgique perdure et soit
continuellement reconduite, si sa cuisine obéit secrètement à
un principe de reprise ?»
Quoi de commun entre le club de football d'Anderlecht
et la semaine du bon langage ? Entre Quick et Flupke
et le chocolat Côte d'Or ? Entre les «navetteurs» et la
monarchie ? Une même question : y a-t-il une culture propre
à la Belgique ? On en débat depuis près de deux siècles, et,
sur ce thème, croyants et iconoclastes se déchirent. Mais
si la controverse paraît inépuisable, c'est que la culture est
pensée trop souvent comme une essence. Le présent essai
entend plutôt l'aborder comme un effet de discours. Dans
sa quête, l'auteur se donne les armes de l'anthropologie et
de la sémiotique, mais aussi et surtout celles d'une ironie à la
fois implacable et complice. Le ton de ce petit livre évoque
irrésistiblement celui des Mythologies de Roland Barthes.