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Si riche que soit son itinéraire, jésuite et anthropologue indissociablement et sans qu'apparaisse jamais l'ombre d'une possible schizophrénie, Claude Pairault n'aurait jamais songé à rédiger ses mémoires. Il n'aurait pas eu le temps ! L'amicale insistance de Jean Benoist et quelques jours de détente partagés avec lui dans un coin de Provence en ont décidé autrement. Comment assez remercier J.B. de son initiative ? Car au fil des entretiens qui sont la matière même de ce livre, les amis de C.P. retrouveront avec bonheur ce qu'ils aiment en lui : la liberté profonde d'un homme pareillement engagé dans le travail anthropologique et la recherche de la foi.
Au terme d'une formation fort sérieuse, il prendra le chemin du Tchad et séjournera plusieurs années dans un petit village totalement ignoré jusqu'alors, Boum Kebir, au bord du Lac Iro, dans le sud-est tchadien. De là il partira à Abidjan où, entre autres tâches, il dirigera pendant quelques années l'Institut d'ethno-sociologie de la toute jeune université ivoirienne. On le retrouvera plus tard dans une situation analogue à l'université de Ouagadougou (Burkina), non sans avoir, entre temps, séjourné quelque temps à Bamako (Mali) et travaillé durant deux ou trois ans avec une mission de l'OMS. Quelques années de «retour au pays natal», puis de nouveau l'Afrique, le Cameroun cette fois, pour épauler la jeune faculté de philosophie de l'université catholique d'Afrique centrale (UCAC) qui vient de s'ouvrir à Yaoundé. A quelque âge de sa vie qu'on le rencontre, C.P. est toujours l'homme des commencements.
L'intérêt de ce livre va pourtant bien au-delà de l'énoncé d'un itinéraire, aussi passionnant soit-il. Car Jean Benoist, l'interlocuteur de C.P., a quelque peine à comprendre comment la liberté de recherche qui va de soi en sciences humaines peut aller de pair avec un état religieux qui comporte nécessairement astreintes et obligations. C.P. en convient volontiers et commente cette situation, parfois difficile, avec liberté et humour. Il n'a jamais été un «convertisseur», il ne s'est jamais senti déchiré, il demeure un homme de foi. Ses amis le savaient déjà.
R.L
