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Anonymes et précédés d'une préface des éditeurs qui s'en
étaient rendus acquéreurs, Les Mémoires d'une inconnue parurent
chez Plon & Nourrit en avril 1894. Historiens et spécialistes
de l'histoire littéraire ne tardèrent pas cependant à percer
l'anonymat de l'auteur : cette inconnue était Marie-Julie
Olivier de Corancez Cavaignac (1779-1849), fille du fondateur
du Journal de Paris et l'un des derniers familiers de Jean-Jacques
Rousseau, épouse du conventionnel régicide Jean-Baptiste
Cavaignac, mère de Godefroy Cavaignac, agitateur
républicain bien connu, et du général Eugène Cavaignac, gouverneur
général de l'Algérie, un moment chef de l'État en 1848
et vaincu par Louis-Napoléon Bonaparte dans la course à la
présidence de la République. Le fils d'Eugène, lui-même
ministre, fit saisir l'édition qu'il avait formellement interdite,
puis se résigna à en laisser paraître un second tirage, précédé
d'une nouvelle préface, en juin 1894.
Ces Mémoires, qui tiennent du récit historique autant que
de la chronique intime et n'étaient pas destinés à la publication,
racontent l'histoire d'une femme et d'une famille de 1780
à 1816, des dernières années de l'Ancien Régime à la chute de
l'Empire. Épouse d'un haut fonctionnaire au service de Murat,
roi de Naples, Marie Cavaignac brosse aussi un tableau attachant
et vivant de cette cour éphémère, tout comme elle sait
évoquer les écrivains et les artistes de cette époque, de Collin
d'Harleville ou de Florian à Marie-Joseph Chénier ou Germaine
de Staël.